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L’Etalement urbain, enjeu sociétal et environnemental… Etude de la FNAUT

Une récente étude initiée par la fédération nationale des associations d’usagers des transports (FNAUT) et financée par l’Ademe aborde le thème de l’étalement urbain et ses dispositions de mobilité en s’appuyant sur un cas de circonstance concret, l’agglomération de Tours. Une agglomération parmi tant d’autre, l’étalement urbain est une spécificité nationale et non locale.

Extraits d’une très bonne analyse du blog “habitat durable” (lien vers l’article original)

Cette étude s’est donc axée vers la comparaison des pratiques de déplacements de ménages ayant déménagé d’une zone périphérique vers la ville de Tours. Un suivi des commodités de 19 ménages qui révèle un certain équilibre de la fréquence des déplacements quotidiens mais surtout montre une forte baisse quant à la distance des trajets quotidiens, de 9 à 6 km, et d’une baisse de l’utilisation de l’automobile, -38 %, un gain environnemental, social, économique pour un profit des dépenses en carburant, de la consommation d’énergie et des émissions de gaz à effet de serre des ménages.

Et pourtant, la voiture reste à l’heure actuelle le transport modal le plus utilisé, notamment dans les zones rurales, avec l’augmentation du prix du carburant, le transport devient grever le budget des ménages, de l’ordre de 15 %, le deuxième poste de dépense avent l’alimentation.

Le PREDIT, programme de recherche et d’innovation dans les transports terrestres et l’ADEME ont confié au PACT d’Indre-et-Loire, mouvement associatif pour l’amélioration de l’habitat, à l’université de Tours (ETIcS) et au cabinet Beauvais-Consultants une étude visant à mesurer les conséquences d’un départ d’une zone périurbaine vers la ville centre sur les consommations d’énergie des ménages au cours de leurs déplacements et sur les émissions de gaz à effet de serre qui en découlent.

Dans une autre étude, initiée par l’agence d’urbanisme de Tours et Beauvais Consultant, la proportion des rejets de CO2 par les ménages périurbains étant deux fois plus qu’un ménage de centre ville de Tours lors des déplacements. Elle a notamment pu mettre en valeur la divergence des ménages périurbains et ceux de la ville centre par la taille du foyer,  le revenu, l’âge, le taux de motorisation.

L’étude de la FNAUT s’est donc orientée vers cette même agglomération de Tours et en parcourant les mêmes ménages, ainsi les consommations et les émissions de chacun de leurs membres ont été évaluées avant et après leur déménagement. L’étude a donc pu mesurer l’impact de ce changement.

Détail de l’étude :

19 ménages ont été consultés notamment sur leur résidence initiale étant implantée en milieu périurbain peu dense, d’une densité moyenne 258 habitants par km2 et située à moins de 30 km du centre de Tours, et de leur résidence actuelle implantée dans la commune de Tours d’une densité moyenne 3896 habitants par km2).

Le déménagement s’est opéré entre 2005 et 2009. Sur les 19 ménages, 9 habitaient dans des banlieues de Tours, 10 en zone périurbaine au sens de l’INSEE, et un en zone rurale ; 18 sont locataires de leur logement, un seul est propriétaire. En majorité, les ménages pris en compte sont des familles.

Pour chacun ménage, le programme d’activité de chaque membre sur l’ensemble de la semaine, dans l’ancienne résidence puis dans la nouvelle, a été recueilli par les enquêteurs. Chaque déplacement a été caractérisé par son motif, sa longueur et le mode de transport utilisé. Seuls les déplacements habituels (effectués au moins une fois par mois) ont été recensés.

Il arrive que la composition de la famille ait varié lors du déménagement, celui-ci ayant souvent eu lieu à la suite d’un divorce : si, par exemple, le mari a quitté le ménage, ses activités ne sont pas prises en compte. En définitive 46 personnes ont été interrogées.

Cinq motifs de déplacement (travail, études, accompagnement, achats, loisirs) et neuf modes (voiture conducteur ou passager, covoiturage, vélo, deux-roues motorisé, marche, bus, car, train) ont été distingués.

Pour les déplacements effectués à pied, en vélo ou comme passager en voiture, la consommation de carburant et l’émission de GES sont nulles. Pour les déplacements effectués en voiture comme conducteur, ces données ont été évaluées en utilisant la méthode des bilans- carbone de l’ADEME, qui tient compte du type de carburant, de la cylindrée et du type de parcours effectué (urbain, extra-urbain ou mixte). Pour les transports collectifs, les ratios utilisés sont issus du rapport Deloitte réalisé pour l’Ademe en 2008.

Au total un volume de 823 déplacements a été analysé pour un cycle hebdomadaire : 412 avant déménagement et 411 après. Le nombre des déplacements n’a pas varié : la forte diminution (-40%) des accompagnements, souvent perçus comme une contrainte de la vie périurbaine, est compensée par la hausse des déplacements pour le travail (+7%), les études (+7%), les achats (+8%) et surtout les loisirs (+14%).

Pour chacun des 19 ménages et pour chaque situation avant et après déménagement, 5 grandeurs ont été calculées :

– la circulation automobile générée par le ménage ;

– sa consommation correspondante de carburant automobile ;

– ses dépenses de carburant ;

– la consommation d’énergie de l’ensemble des modes de déplacement utilisés par le ménage ;

– le tonnage d’émissions d’équivalent CO2 généré par l’ensemble des déplacements du ménage.

En totalisant ces grandeurs pour l’ensemble des 19 ménages, on peut alors comparer quantitativement les situations avant et après déménagement. Les résultats résumés en encadrés concernent les déplacements habituels et sont rapportés à une personne, conductrice ou non.

Mais des enseignements qualitatifs instructifs ont également été recueillis au cours des enquêtes.

On ne démé
nage pas pour réduire sa facture de carburant ou ses émissions de CO2. La principale raison est la séparation des conjoints (7 cas sur 19). D’autres causes ont été notées :

des loyers trop élevés, des liens sociaux difficiles à tisser en zone périurbaine, des pertes de temps dans les déplacements automobiles quotidiens, le manque d’autonomie des enfants faute de desserte par transport collectif.

Le changement de résidence est bien vécu par 14 ménages sur 19. Malgré certaines nuances (manque de jardin, pollution, vie chère), beaucoup mettent en avant la liberté procurée par la proximité des activités en milieu dense.

Le kilométrage annuel effectué en voiture passe de 6.000 km à 3.700 km soit une baisse de 38%. Les écarts autour de cette moyenne sont importants. Dans 3 cas sur 19, le kilométrage parcouru en voiture a même augmenté : une personne en congé parental a repris son travail et s’y rend en voiture ; une autre travaille maintenant à Amboise et s’y rend aussi en voiture.

La consommation annuelle de carburant passe de 474 litres à 298 litres soit une baisse de 37%, un peu inférieure à celle du kilométrage. L’augmentation de la consommation moyenne (8,0 litres aux 100 km aujourd’hui contre 7,9 litres avant le déménagement) est imputable à plusieurs causes : une proportion plus importante des parcours est effectuée en zone urbaine ; contrairement à ce que à quoi on s’attendait, la proportion de véhicules diesel a baissé, passant de 51 % à 43 %, et la cylindrée moyenne a augmenté, passant de 6,0 à 6,3 CV.

Les dépenses annuelles de carburant passent de 591 ! à 349 ! soit une économie de 242 ! et une baisse de 41%, légèrement supérieure à la réduction de la consommation (37 %) car le prix moyen du carburant a baissé passant de 1,25 ! par litre à 1,17 ! par litre. Cette baisse s’explique par le fait que beaucoup de déménagements datent de 2008, année où le prix à la pompe a explosé.

La consommation annuelle d’énergie passe de 502 kep à 346 kep soit une baisse de 31% (et non 37% car les anciens utilisateurs de la voiture utilisent d’autres modes dont certains ne consomment pas d’énergie (marche, vélo) alors que d’autres en consomment (bus, car, train).

Les émissions annuelles de gaz à effet de serre (GES) passent de 1,4 tonne à 0,9 tonne soit une baisse de 35% (et non 31% car certains transports collectifs utilisés sont à traction électrique).

Longueur des déplacements

La baisse de la consommation d’énergie et des émissions de gaz à effet de serre n’est pas due à une réduction du nombre, qui est resté constant, des activités des ménages exigeant des sorties du domicile. Elle est due à la diminution, très prononcée, de la longueur moyenne des déplacements, qui passe de 9 km à 6 km (-33 %) : la baisse est particulièrement nette pour les achats (-75%), l’accompagnement (-65%) et les études (-65%), elle est plus faible pour le travail (-25%) et surtout pour les loisirs (-15%) car souvent les personnes qui ont déménagé rendent visite le dimanche à leurs parents et amis restés dans leur commune d’origine.

Répartition modale

On note la baisse de l’utilisation de la voiture (-42%) au profit des transports collectifs (+40%), du vélo (+100%) et surtout de la marche (+243%). C’est assurément la diminution des distances moyennes qui a permis cette évolution : les déplacements pour les études, l’accompagnement et les achats ne dépassent plus, en moyenne, 2 km si bien qu’ils peuvent, en grande partie, être faits à pied.

La répartition modale des déplacements est donc fortement affectée par la nouvelle localisation, plus urbaine, de l’habitat des ménages étudiés. La marche représente aujourd’hui 38 % des déplacements contre seulement 11 % avant le déménagement. La part de marché de la voiture diminue de 79 % à 46 %. Parallèlement, le vélo et les transports collectifs gagnent chacun 3 points de part de marché en passant respectivement de 3% à 6% et de 7% à 10%.

En conclusion, les résultats de cette recherche exploratoire montrent l’intérêt, pour les ménages comme pour la collectivité, d’opérations telles que les OPAH (opérations programmées d’amélioration de l’habitat) qui visent à convaincre les bailleurs de remettre des logements sur le marché en centre-ville afin d’y installer des familles.

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La FNAUT a donc émis des propositions concernant la maîtrise de l’étalement urbain.

L’étalement urbain se présente sous la forme d’une périurbanisation en tache d’huile et, de plus en plus, d’un éparpillement urbain : les communes dont la croissance démographique est la plus rapide sont les communes rurales de 500 à 2 000 habitants.

Ce phénomène, dont les causes sont multiples et souvent imbriquées et qui continue à se développer, est, de longue date, une préoccupation fondamentale de la FNAUT en raison de ses conséquences sociales, économiques et écologiques inacceptables.

– Il explique en grande partie (avec la séparation spatiale des différentes fonctions urbaines) la croissance persistante de la circulation automobile urbaine, qui engendre accidents, nuisances, dégradation de la santé publique, consommation élevée d’espaces agricoles et naturels, gaspillages de pétrole, émissions de gaz à effet de serre.

– Il fragilise les ménages périurbains aux revenus modestes qui, en raison de la hausse inévitable du prix du pétrole, vont voir augmenter les prix de leurs déplacements et baisser celui de leur patrimoine immobilier.

Yves Martin, ingénieur général des Mines, ancien président de la Mission Interministérielle contre l’Effet de Serre : « la ville est invivable avec l’automobile et la périphérie urbaine invivable sans l’automobile ».

Gilbert Lieutier, président de l’association Rue de l’Avenir, membre de la FNAUT : «j’aime les villes qui ont su maîtriser leur développement et s’arrêtent là où commencent la campagne et la nature. L’étalement que nous connaissons produit une non-ville au milieu d’une non- campagne».

Réorienter la politique des transports ne suffira donc pas pour réduire la circulation automobile, une inflexion simultanée et très volontariste de la politique d’urbanisme et de logement est indispensable.

Il s’agit aujourd’hui de maîtriser l’&e
acute;talement urbain et de densifier les zones déjà urbanisées. Cette perspective est rejetée par une partie de l’opinion. Mais il n’est évidemment pas question d’imposer dans les zones urbaines françaises la densité de Hong Kong, 30 000 habitants/km2 ! Une densification urbaine intelligente est possible et ne doit pas faire peur : on peut « densifier sans entasser » dans des tours et dans des barres, en suivant l’exemple des pays germaniques et anglo-saxons.

1 – Transférer toutes les compétences en matière d’urbanisme (documents d’urbanisme, permis de construire,…) des communes aux autorités d’agglomération, ces dernières étant élargies à l’échelle géographique des aires urbaines.

2 – Taxer plus fortement les logements inoccupés pour favoriser leur remise sur le marché.

3 – Récupérer les friches urbaines, artisanales, industrielles et militaires. Réhabiliter l’habitat ancien. Privilégier l’habitat social.

4 – Densifier l’habitat et les activités autour des gares ferroviaires, en particulier périurbaines, et le long des axes de transport collectif urbain en site propre. Rouvrir des lignes périurbaines (cas école de l’agglomération de Tours).

5 – Favoriser le commerce de proximité, par exemple en taxant le stationnement sur les grandes surfaces commerciales périphériques.

6 – Cesser d’encourager la circulation automobile urbaine par la construction de nouvelles infrastructures routières et de parkings centraux, réduire la vitesse maximale autorisée sur les grandes voiries urbaines. Etudier la localisation et le dimensionnement des parcs relais de façon à ne pas contribuer à l’étalement urbain.

7 – Tarifer la circulation automobile urbaine à son juste coût pour la collectivité (congestion, nuisances locales, effet de serre) en introduisant le péage urbain et, bien entendu, en affectant son produit au développement des alternatives à la voiture.

8 – Pour libérer de l’espace en ville, favoriser la pratique de l’autopartage.

 

Jean-Marie Guidez, expert en mobilité au CERTU de Lyon : “l’urbanisme en doigts de gants, mis en œuvre en Allemagne, Suisse, pays scandinaves et dont Hambourg est un bon exemple, permet de vivre loin du centre-ville, dans une maison avec jardin, dans un environnement dense à proximité d’une liaison de type RER”.

Un S-Bahn à 13 branches dessert depuis longtemps la région de Munich dans un rayon limité de 40 km : 440 km de lignes, 1 000 trains et 800000 voyageurs par jour contre 2 800 km de lignes, 1 100 trains et 130 000 voyageurs par jour sur le réseau TER de la région Rhône- Alpes. La performance du S-Bahn est confirmée par une étude de l’Agence Européenne de l’Environnement portant sur 24 grandes villes européennes dont Munich, qui est la seule à ne pas avoir été affectée par l’étalement urbain depuis 50 ans.

La notion novatrice de contrat d’axe, apparue lors des travaux engagés pour la révision du PDU de Toulouse, est une démarche négociée entre une autorité organisatrice de transports urbains (AOTU) et le territoire pouvant accueillir un projet de transports collectifs : l’AOTU s’engage sur un projet de transport en site propre (TCSP) ; les communes concernées s’engagent sur des moyens de favoriser la densité urbaine autour du TCSP et l’accessibilité aux stations. Cette démarche cohérente et volontariste va être mise en œuvre dans l’agglomération grenobloise pour la ligne E de tramway, le long de laquelle 2000 logements seront construits.

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L’étude – Localisation de l’habitat et pratiques de déplacement

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