Moulins à eau : le Conseil constitutionnel valide l’exemption de continuité écologique pour la production d’hydroélectricité

Dans une décision QPC (question prioritaire de constitutionnalité) rendue ce 13 mai, le Conseil constitutionnel a jugé conformes les dispositions contestées de l’article L. 214-18-1 du code de l’environnement, qui prévoient un régime d’exclusion des obligations de continuité écologique des cours d’eau posées à l’article L. 214-17 pour certains anciens moulins à eau équipés par leurs propriétaires, par des tiers délégués ou par des collectivités territoriales pour produire de l’électricité.
“Il y a certains sujets qui, comme des aimants, semblent attirer la limaille du contentieux (…)”, relevait dans ses conclusions le rapporteur public, Stéphane Hoynck, à l’appui de la décision de renvoi du Conseil d’État sur cette affaire. Et pour cause les tensions entre les tenants de la continuité écologique des cours d’eau, pour lesquels les moulins perturbent l’équilibre naturel, et les défenseurs du patrimoine et de la petite hydroélectricité, n’en finissent pas de s’exprimer dans l’hémicycle ou devant les tribunaux depuis plusieurs années. Ce n’est d’ailleurs pas la première fois que le Conseil constitutionnel a à connaître du sujet. Et certainement pas la dernière…
En l’espèce, France nature environnement (FNE) et plusieurs autres associations reprochaient à l’article en question – dans sa rédaction issue de la loi n° 2017-227 du 24 février 2017 ratifiant les ordonnances “autoconsommation” (n° 2016-1019 du 27 juillet 2016) et “énergies renouvelables” (n° 2016-1059 du 3 août 2016) – d’exempter les moulins de toutes les obligations et prescriptions pour assurer la migration des poissons et le transport des sédiments. Il en résulterait une méconnaissance du droit de vivre dans un environnement équilibré garanti par l’article 1er de la Charte de l’environnement, dont la préservation de la continuité écologique des cours d’eau serait une composante, ainsi que de ses articles 2 à 4. Elles soutenaient en outre une rupture d’égalité, pointant une différence de traitement injustifiée entre les moulins équipés pour la production hydroélectrique et les autres ouvrages hydrauliques.
Des arguments écartés par le Conseil constitutionnel. Tout d’abord, les limitations apportées à l’article 1er de la Charte trouvent justification dans des motifs d’intérêt général : “(…) le législateur a entendu non seulement préserver le patrimoine hydraulique mais également favoriser la production d’énergie hydroélectrique qui contribue au développement des énergies renouvelables”. Le juge constitutionnel s’attache par ailleurs à l’application de ce régime juridique d’exemption dans le temps. En bénéficient les seuls moulins équipés pour produire de l’électricité “existant” à la date de publication de la loi de ratification du 24 février 2017, remarque-t-il. En sus, la dispense “ne s’applique pas aux ouvrages installés sur les cours d’eau en très bon état écologique, qui jouent le rôle de réservoir biologique ou dans lesquels une protection complète des poissons est nécessaire”, souligne le Conseil. Au final, l’exemption produit ainsi son plein effet pour les 5.800 ouvrages situés en liste 2, qui étaient jusqu’ici tenus de réduire leur impact sur la continuité écologique dans le délai de cinq ans.
En dernier lieu, la décision QPC relève également que la dérogation est circonscrite aux règles découlant du 2 ° du paragraphe I de l’article L. 214-17 du code de l’environnement et ne fait pas obstacle, “en particulier, à l’application de l’article L. 214-18, qui impose de maintenir un débit minimal garantissant en permanence la vie, la circulation et la reproduction des espèces aquatiques”.

L’article original sur le site de la banque des territoires

 
Référence : décision n° 2022-991 QPC du 13 mai 2022, Association France Nature Environnement et autres.

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